lundi 6 mai 2013

J'ai été voir... Mud


Après le très remarqué Take Shelter (grand prix de la Semaine de la Critique à Cannes en 2011), le réalisateur Jeff Nichols revient avec un nouveau film, Mud, présenté en compétition officielle à Cannes l'an dernier.

DeWitt, Arkansas, sur les rives du Mississipi, Ellis et Neckbone ont 14 ans. Ils croisent le chemin de Mud, un fugitif qui va les convaincre de l'aider.

Alors que Take Shelter avait un côté oppressant et psychologiquement dérangeant, Mud est un film plus posé. Nichols fait confiance à son histoire ainsi qu'à ses acteurs et donne une grande impression de maîtrise. Il réussit là où un Terrence Malick (dont il est souvent décrit comme l'héritier) échoue: il ne conceptualise pas à outrance et nous emporte cependant dans un univers très esthétique.

Le fleuve, les maisons flottantes, l'accent presque incompréhensible: bienvenue dans le sud des Etats-Unis qui inspire de nombreux films ces derniers mois (Killing Fields, Django Unchained, Killer Joe). Nichols plante ce décor qui évoque forcément Tom Sawyer et Huckelberry Finn. Vous avez dit mythes américains? Mud a également quelque chose du cow-boy solitaire. Sans vouloir les réinventer, le réalisateur se sert de ces images comme autant de repères. Il cite Clint Eastwood dans ses modèles et ça n'est pas vraiment étonnant.

La nature tient une place centrale dans Mud. La vie des personnages est rythmée par le Mississipi et les deux ados passent leur temps dans le bayou ou sur leur bateau. Les paysages filmés sont magnifiques et il y règne pourtant une sorte de sombre violence et une atmosphère poisseuse.

Le tour de force de Nichols est de parler d'amour dans ce décor. Ellis se pose beaucoup de questions et il se reccroche à Mud qui incarne ses idéaux de petit garçon. Pourtant, on ne tombe jamais dans une fable cul-cul. Peut-être parce que Mud est une histoire d'hommes: de garçon, de père, de fils, d'amoureux, tout ça au masculin. 

On voit les enfants (notamment Tye Sheridan, très bon et déjà vu dans Tree of Life) grandir et perdre leur illusions. Les adultes n'ont d'ailleurs que des rôles secondaires. Aucun n'est cependant utilisé qu'à moitié.
Reese Witherspoon est Juniper, la belle pour qui Mud sacrifie tout: ou comment être trash et délicate à la fois. Michael Shannon (qui était le héros dans Take Shelter) campe ici l'oncle bouseux mais bienveillant de Neck. Mais aussi Sam Shepard, Sarah Paulson entourent ces ados et participent à leur parcours initiatique.

Et surtout, il y a Matthew McConaughey, qui éclaire Mud de son talent. Envoûtant, il met son charme animal au service de ce personnage aux multiples facettes. 

Tous ces individus évoluent au cours de l'histoire qui n'oublie personne en chemin. Pas de superflu... On peut cependant reprocher à Mud un manque de densité qui font durer le film 20 minutes de trop.
Mais Nichols signe ici un film fin et romantique, 100% américain dans le meilleur de ce que cela peut signifier.

La petite anecdote:
Les emprunts à la littérature de Mark Twain sont nombreux mais le plus clair est la croix sous la talon de la botte de Mud: dans Huckleberry Finn, c'est de cette façon que Huck et Tom savent que le père ivrogne de Huck est dans les parages.

Infos pratiques:
Mud
sorti le 1 mai 2013 en France
réalisateur: Jeff Nichols
avec: Matthew McConaughey, Tye Sheridan, Reese Witherspoon, Sam Shepard, Michael Shannon
bande-annonce: http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19494878&cfilm=196628.html

1 commentaire:

  1. Le contre : Mud patauge pendant une bonne heure, durant laquelle le réalisateur ne fait pas grand chose d'autre que d'installer son cadre (LE point fort du film). Les allers retours en barque à base de Macaroni c'est bien joli, mais ça nourrit pas son homme. Si belles que soient les rives du Mississippi à travers la caméra de Jeff Nichols, je ne suis jamais monté à bord de cette histoire, trop timide peut être, pour m'emporter vraiment avec elle.

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