lundi 4 mai 2015

Good Kill


Pour compléter American Sniper, sorti il y a quelques semaines, voici un autre film sur les interventions militaires américaines et leurs dégâts sur les soldats.

Thomas Egan est un pilote qui ne vole plus. Après avoir eu un F-16 entre les mains, il commande maintenant un drone de combat, depuis une base située à côté de Las Vegas.

Le réalisateur Andrew Niccol s'intéresse depuis longtemps à la place que prend la technologie dans nos vies. Après Bienvenue à Gattaca et plus récemment Time Out, le scénariste de The Truman Show abandonne la science-fiction et base son récit sur des faits réels. 
La problématique reste cependant proche: la guerre se fait maintenant par écrans interposés et devient de plus en plus virtuelle, même si les victimes sont toujours de chair et de sang.

L'armée américaine utilise de plus en plus souvent ces drones pour bombarder les théâtres d'opération. Capable d'une précision chirurgicale alors qu'ils sont stationnés à 10 000 pieds et minimisant les dangers (moins d'hommes au sol), cette technique a aussi ses détracteurs. Les dommages collatéraux, les morts de civils sont en effet non négligeables.
C'est d'ailleurs là que se trouve le premier reproche qu'on peut faire au film: Niccol dénonce ces frappes et leur côté inhumain mais il le fait de façon peu subtile. Il ne donne pas à Good Kill l'ampleur nécessaire à un réquisitoire anti sale guerre. Certains dialogues entre soldats frisent d'ailleurs la caricature.

Pour Thomas Egan, ce n'est pas l'éthique de ces frappes qui le dérange mais plutôt de ne pas être lui-même en danger. A l'abri dans son caisson climatisé, il rentre chez lui le soir pour border ses enfants et ça le rend malade. 
Le sujet pouvait être passionnant: ces pilotes, souvent recrutés parce qu'ils sont bons aux jeux vidéos, comment font-ils la part des choses? Comment compartimenter? A quels conflits moraux font-ils face?
Alors que le film aurait pu traiter plus en profondeur de cette déconnexion à la réalité, il dérive vers un grand classique des films qui touchent à l'armée: le personnage principal traverse une crise conjugale. Tous les soldats américains ont-ils tous des problèmes à la maison? Les états d'âme de notre pilote de drones tournent finalement davantage autour des soupçons d'infidélité de sa femme que sur le nombre de civils qu'il a pu tuer. Et c'est dommage.

Le rythme est volontairement lent et le spectateur, comme le personnage principal, se retrouve en mal d'action. Un malaise s'installe et ont suit passivement que l'histoire se déroule. Niccol n'évite d'ailleurs pas l'écueil la démagogie sur la fin du film. Il réalise une démonstration assez laborieuse: certes très documentée mais pas enthousiasmante.

Ethan Hawke (dés)incarne ce pilote qui rêve de Top Gun mais qui est coincé avec une X-Box meurtrière dans le désert de Las Vegas. Son visage se creuse petit à petit et il garde une fermeture qui correspond bien au personnage complexe.
On remarque également January Jones, déjà vue dans la série Mad Men et qui endosse à nouveau le costume de mère de famille délaissée.

Good Kill (expression à traduire par "dans le mille") explore un sujet d'actualité et à fort potentiel cinématographique: la guerre à distance et à armes inégales. Malheureusement, le réalisateur ne se donne pas la chance d'aller au bout. Le résultat est trop sobre et défend des idéaux trop manichéens pour nous embarquer avec lui.

A voir pour nourrir le débat sur les nouvelles formes d'intervention armée, pas nécessairement pour l'objet ciné.

La petite anecdote:
A ce jour, l'armée américaine est quasiment la seule à utiliser des drones de combat, en particulier pour des frappes (la France en possède deux qu'elle utilise pour des missions de reconnaissance). 
Les USA viennent par ailleurs d'autoriser la vente des drones de combat à leurs alliés, ce qui va ouvrir un marché conséquent aux entreprises américaines qui ont pris de l'avance dans le domaine.

Note:
2.5/5

Infos pratiques:
Good Kill
sorti le 22 avril 2015 en France
réalisateur: Andrew Niccol
avec: Ethan Hawke, January Jones, Zoe Kravitz

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